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Historique

Chapitre 2 Chapitre I

Nombre de mots : 1308    |    Mis à jour : 07/09/2021

remières froidures de l’hiver. Sous les pas rapides des passants, la neige disparaît pour quelques instants et revient aussitôt sous la densité inhabituelle des flocons. Le vent du nord ramène s

était veuve depuis deux décennies. À cette époque, nouveau locataire dans l’immeuble, monsieur Victor avait signé comme il se devait le registre mortuaire posé sur la table recouverte de toile noire à l’entrée de la conciergerie. Il avait trouvé une femme touchée par le deuil, mais jamais triste ni de larmes dans les yeux. Ambroisine avait travaillé dans le passé dans une maison d’édition où, en plus d’être correctrice, elle s’essayait à l’écriture de poésies. D’un séjour passé au Japon, elle avait ramené dans ses valises des tissus bariolés et féminins. D’une alchimie presque parfaite, le mélange de l’écriture et de la couture assouvissait ce désir de beauté complémentaire. De ces motifs chinés ou rayés, sortait une poésie tangible telle que les us et coutumes en étaient tout chamboulés. D’une finesse d’écriture, elle portait volontiers secours aux jeunes romanciers qui

’hui que le même sucre tombait dans la même tasse. Vingt ans aujourd’hui que la cuillère polie par le temps tournait inexorablement comme l’aiguille impitoyable de cette satanée horloge. « Sale temps ce soir, madame Imbert », s’aventurait de lancer Victor. « Pas vra

l détenait dans les montagnes cévenoles. En baissant la tête, pensif et les mains légèrement tremblantes, il sentit une odeur soudaine de cigarette qui émanait de l’enveloppe. Cette odeur de tabac qui caractérisait autrefois le passage de Delphine, la cigarette à la main. Un moment d’étourdissement pour lui, qui n’attendait rien aujourd’hui et surtout pas une lettre parfumée qui le troublait au plus profond de lui-même. Il reposa l’enveloppe sur le guéridon noir t

e ratait jamais une occasion de faire plaisir à monsieur Victor qu’elle savait friand et fervent de cuisine régionale. Et puis, c’était aussi un prétexte pour passer un moment avec lui. Des instants où elle se délectait de paroles chaudes, signes d’un vécu compliqué mais attachant. « Je ne sais comment vous remercier Ambroisine, vous me gâtez trop », disait Victor. Il lui tendait un bibelot en forme de sabot, abritant en son creux un petit ramoneur, le visage noir de suie, une échelle dans le dos. Les étagères de la conciergerie croulaient sous les babioles et divers ramasse-poussières offerts en échange de petits services rendus. Pendant qu’il dévorait goulûment sa pitance, Ambroisine aperçut, posée sur le

demain, Victor demanda à Ambroisine d’ouvrir la lettre et de la lire. Victor, assis sur son fauteuil, écoutait calme et attentif comme un élève

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