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Disparu en Normandie, 1944

Disparu en Normandie, 1944

5.0
30 Chapitres
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Résumé

Table des matières

Sentant la mort proche, André fait jurer à son fils Philippe de retrouver la trace du héros de la famille, son propre père, médecin des commandos Kieffer, disparu en Normandie en 1944. Philippe, héritier d’une tradition patriarcale vouée à la médecine et l’armée, va se lancer dans une recherche difficile et dangereuse, orientée par les précieux témoignages des vétérans, d’un oncle, ancien maquisard limousin, et les lumières d’une jeune femme professeure d’histoire… Tiendra-t-il sa promesse ? À PROPOS DE L’AUTEUR Auteur de romans historiques, Dominique Grouille est médecin au CHU de Limoges. Dans Disparu en Normandie, 1944, il s’inspire de son patrimoine familial et nous fait revivre la Seconde Guerre mondiale.

Chapitre 1 No.1

À la mémoire de Martin, mortellement blessé dans les Dardanelles en 1915.

À la mémoire de Lucien, grand mutilé de guerre 14-18.

À la mémoire de Jacques, grièvement blessé lors du débarquement en Provence en 1944.

À la mémoire de Jean, ancien membre du maquis limousin.

À Martine, Pierre, Julien et Nicolas.

Avertissement

En dehors des personnalités historiques, tous les personnages de ce livre sont le fruit de l’imagination de l’auteur. Par contre, la trame historique des commandos Kieffer et du maquis limousin est scrupuleusement respectée.

Chapitre 1

L’homme se promène les bras dans le dos dans cette cour ceinte de hauts murs dont l’ombre envahissante gâche le temps agréable de ce début de printemps ensoleillé. Il écoute d’une oreille distraite une personne de connaissance rencontrée lors de ses séjours précédents. Il en a marre de ses jérémiades sur ses malheurs, de la drogue qui l’aide à tenir, et bla, bla, bla, il l’a entendu cent fois. Il fait semblant d’écouter mais évite de répondre autrement que par de hochements de tête et des « oui, oui » ou « ah bon ». Dit-il vrai, ce jeune abruti ? N’est-il pas là, pour lui tirer les vers du nez, lui faire avouer ses secrets ? Il en a assez de ces soi-disant compagnons d’infortune, dont beaucoup sont sûrement ici pour l’espionner. Des moutons, comme on dit. Marre aussi des interrogatoires en règle. Mais il sait mesurer ses paroles et dire ce que veut entendre celui qui tient son sort entre ses mains. C’est pourquoi l’homme ne se départit jamais du comportement modèle correspondant aux normes en vigueur en ces lieux.

En tout cas, il n’est pas question de croupir ici, car il doit absolument revenir chez lui à temps pour réaliser le projet qui lui tient tellement à cœur.

***

Philippe se tourne et se retourne dans le lit de son appartement de Limoges. Il cherche vainement un sommeil qui se dérobe sans cesse. Une heure du matin en ce 7 avril 1998 s’affiche narquoisement sur le cadran lumineux de son réveil. Pourtant il devrait s’endormir facilement après presque 36 heures de travail sur le qui-vive. Une journée d’activité de jour, suivie d’une nuit de garde – durant laquelle il n’a pu s’allonger que deux heures seulement – débouchant sur une nouvelle prise de fonction au bloc opératoire. Il est vrai que la dernière partie a été éreintante, encore plus que d’habitude, malgré la haute concentration en caféine. Car au lieu du train-train habituel il a dû s’occuper d’un polytraumatisé à problème. Et il ne parvient pas à en chasser les images.

L’opération se termine et Philippe allège l’anesthésie. L’orthopédiste a fixé sans trop de difficulté le fémur fracassé à l’aide d’un long clou enfoncé sur toute la longueur de l’os. Il referme maintenant la plaie provoquée par un fragment osseux en regard de la fracture. Mais Philippe est inquiet en regardant l’écran de contrôle des paramètres vitaux. La tension artérielle reste basse. Pourquoi ? Il reprend le dossier du jeune blessé rédigé depuis son arrivée aux Urgences et dessine un tableau à deux colonnes sur une feuille blanche. Il s’adresse ensuite à l’infirmier anesthésiste qui a réalisé avec lui les transfusions au bloc.

— Regarde, si on note d’un côté le saignement provoqué par les lésions observées et de l’autre les flacons de sang administrés, ça ne colle pas. Scalp, on peut évaluer les pertes à près d’un litre répandu sur le dossier du siège de la voiture. Mais stoppée par le pansement compressif des collègues du SAMU. Fracture du bassin, un litre en moyenne dans l’hématome. Fracture ouverte du fémur, disons un demi-litre par la plaie et un bon litre pendant le geste chirurgical, en additionnant l’aspiration et les compresses imbibées. Bon, quelques côtes sont cassées à gauche, mais pas d’épanchement visible à la radio à ce niveau. Ça nous fait un total 3 litres et demi. Pourtant, si on fait la somme des transfusions qu’il a reçues, on arrive à plus de 4 litres…

Son assistant hoche la tête :

— Oui, tu as raison, normalement la tension devrait être remontée.

— Donc, il y a autre chose qui saigne !

Philippe se penche alors vivement sous les champs opératoires et palpe le ventre du patient.

— Oh, l’abdomen est très tendu ! Ce pourrait bien être une rupture de rate provoquée par le traumatisme du thorax de ce côté-là…

Il informe aussitôt le chirurgien :

— Laurent, nous avons un gros problème. Impossible de faire remonter la tension alors que tous les saignements ont été largement compensés. En l’examinant, je pense qu’il a une rate, en plus du reste…

— Ils ne l’ont donc pas examiné aux Urgences ? grogne ce dernier.

— Tu sais, la rupture peut être décalée dans le temps. Et avec les manipulations sur la table… Bon, si tu es d’accord, je vais appeler immédiatement le chirurgien viscéral.

— Oui, bien sûr, tu as raison, il ne faut pas perdre de temps !

Philippe se tourne vers l’infirmier :

— Bon, il ne faut pas le réveiller avant le transfert dans l’autre bloc. On « remet les gaz », on fait remonter la tension avec de l’Adrénaline au pousse-seringue électrique et on commande 4 culots globulaires et 2 plasmas de plus.

Quinze minutes plus tard, le patient est transporté sur un chariot quand le bip-bip du scope ralentit quelques secondes avant de s’arrêter en déclenchant le sifflement suraigu de l’alarme.

— Merde, arrêt cardiaque ! s’écrie Philippe. Vite, adrénaline 1 milligramme, intraveineux direct, et je commence à masser.

Et finalement le cœur est reparti. Mais Philippe n’a été rassuré que lorsque le jeune homme a ouvert les paupières en salle de réveil avec une tension normalisée et stable.

Une foule de questions tourne et tourne encore dans sa tête. N’aurait-il pas pu faire le diagnostic de lésion splénique plus tôt ? N’a-t-il pas tardé à commander plus de sang ? Le jeune homme ne va-t-il pas garder des séquelles cérébrales ? En effet, « bien réveillé » après une anesthésie veut dire que le patient garde les yeux ouverts et qu’il est capable de répondre « oui » ou « non » aux questions simples comme « avez-vous mal » ? Mais un arrêt cardiaque, même de courte durée, peut léser le cerveau et on ne s’en apercevra que les jours suivants. Lorsqu’il a parlé aux parents du blessé ce soir pour les tranquilliser, il a partagé leur émotion d’avoir failli perdre leur fils et leur joie qu’il soit sauvé. Mais comment réagiraient-ils dans le futur s’ils lui imputaient d’éventuelles séquelles ? S’il ne pouvait plus poursuivre ses études à cause de trouble de la mémoire ou de la concentration, par exemple ? Ou plus grave encore…

***

Le ronflement aigu d’un vélomoteur sans pot d’échappement déclenche l’aboiement d’un chien dans un appartement voisin. Philippe est brutalement tiré de la torpeur qui l’avait gagné.

D’autres images pénibles qu’il voudrait oublier ressurgissent malgré lui. Ce jeune soldat était arrivé en même temps que d’autres moins touchés, à l’hôpital de campagne aux fins fonds du désert Irakien. Il était inconscient et couvert de sang. Tandis qu’il l’examinait, son cœur s’est arrêté. Il a réussi à le réanimer et à le maintenir en vie durant l’opération pour stopper l’hémorragie due à la section d’une artère du bras. Il a été heureux de le voir reprendre ses esprits les heures suivantes. Puis le blessé a été rapidement rapatrié en France par avion pour la suite de sa prise en charge.

Quelques mois plus tard, ses parents ont demandé à rencontrer Philippe. Son nom avait été cité par le chirurgien qui l’avait opéré ce jour-là et retrouvé en premier. Un couple d’une cinquantaine d’années était assis en salle d’attente et s’est levé à son arrivée. Auprès d’eux un grand jeune homme triste a simplement tourné la tête.

— Bonjour, mon Capitaine, ma femme et moi voulions absolument vous remercier d’avoir sauvé notre fils !

Bien qu’averti de cette visite par ses supérieurs, Philippe ne le reconnaissait pas avec ses longs cheveux bouclés et son visage un peu bouffi.

Le père s’est approché de lui pour l’aider à se lever :

— Stéphane, viens saluer le docteur qui s’est occupé de toi quand tu as été blessé.

Il s’est levé à grand peine et a fait quelques pas en titubant malgré le soutien de son père. Il a tendu une main agitée de tremblements à Philippe et a ânonné :

— Mer… ci do-docteur.

Philippe a senti son cœur se serrer. Le système nerveux du malheureux avait été gravement lésé par son arrêt cardiaque.

La mère a senti sa gêne et a expliqué d’un ton rassurant :

— Notre fils est en rééducation aux Invalides. Il fait des progrès, mais les médecins nous ont avertis que la guérison serait très longue.

Pauvres gens, a pensé Philippe. Croient-ils vraiment que leur fils va retrouver une vie normale ?

Il faut absolument qu’il dorme un peu. Il allume sa lampe de chevet et avale un Xanax. En attendant son effet, il se remémore comment il avait été entraîné dans cette guerre improbable…

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Mis à jour : Chapitre 30 No.30   12-01 11:41
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