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Ma vie sans toi

Ma vie sans toi

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Résumé

Table des matières

À la fin de l’été 2022, Marion et Colin, jeunes, amoureux et inséparables, trouvent une clé USB qui abrite le récit d’un amour adultère, passionnel et tumultueux vécu 25 ans auparavant. Cette histoire secrète est celle de Sophie, la mère de Colin. À travers cette lecture, ce dernier se plonge à la fin des années 90 et fait une découverte bouleversante. L'auteure Emmanuelle Silvano est fascinée par les relations humaines. Elle se plait à s'asseoir sur les étiquettes morales et explorer l'amour sous toutes ses formes, qu'il soit sublime ou douloureux. Avec Maviesanstoi, elle signe une romance interdite liée par la passion et la famille.

Chapitre 1 No.1

Maviesanstoi

Ecrit par Emmanuelle SILVANO

I

Ma mère

— Humm, qu’est-ce que tu veux, Laura ? J’dors là.

— Ma mère est morte.

Ce vendredi printanier promettait pourtant à Marion une douce et agréable grasse matinée. Les rayons du soleil, traversant les persiennes de sa chambre, venaient lui caresser les pieds, légèrement découverts de la fine couette fleurie sous laquelle elle dormait paisiblement. Elle venait tout juste d’entamer sa dernière phase de sommeil, la meilleure phase – tu sais, celle des rêves « genre un peu chelous » mais « grave trop bien en fait ». Et, par ce simple geste spontané, par ce glissement de pouce de gauche à droite sur l’écran de son smartphone pour répondre à l’appel de sa meilleure amie, la voilà brutalement sortie de cette bulle confortable de paix, pour basculer dans un tourbillon d’effroi, d’incompréhension, d’injustice, de souffrance et de souvenirs, hélas, encore trop récents.

— Quoi ?

— Viens de suite… j’ai besoin de toi là, maintenant ! sanglote Laura.

À présent, les yeux grands ouverts et le cœur tapant aussi fort qu’un batteur de rock percute sa grosse caisse de sa double pédale, Marion se redresse sur son lit. Figée, l’air abasourdi, elle est partagée entre la précipitation de rassembler toutes ses affaires pour rejoindre au plus vite Laura, son amie de toujours, et cette rafale d’émotions négatives qui la paralyse.

Quelques secondes se passent, puis, une fois un pied à terre, le mental prend le dessus. Après un coup de brosse à dents passée rapidement sous l’eau froide, sa chevelure blonde et bouclée grossièrement démêlée à l’aide de ses doigts, et des aisselles rafraîchies par un gant de toilette encore humide ayant servi à son démaquillage de la veille, Marion enfile, par-dessus son ensemble débardeur-shorty de nuit, un short en jean et un sweat crop top oversize nonchalamment déposés au sol. Et hop, elle rassemble, en cinq minutes, quelques affaires, utiles ou pas, et les entasse en vrac dans son grand sac à main fourre-tout puis descend dans la cuisine.

Et voilà c’est tout son père ça ! Elle trouve, sur le plan de travail de la cuisine, du café, un sac de viennoiseries et un mot disant : « Je suis parti plus tôt que prévu à Reims. T’as des petits pains au chocolat pour t’aider dans tes révisions. Je t’aime ma grenouille. ». Elle arbore un sourire plein de tendresse. Elle retourne le post-it, prend un stylo et écrit à son tour « T’es un ange my dad, je descends sur Saint-Cyp, je t’expliquerai de vive voix. TM fooort ». Elle dépose délicatement le mot sur la machine à café et attrape sac, chapeau, lunettes, clefs de voiture, sac de gourmandises bien huileuses et thermos de café. Elle enfile ses tongs, croque dans un pain au chocolat et sort en refermant la porte d’entrée avec son pied. C’est parti pour une bonne heure de route, direction les Pyrénées-Orientales, direction Saint-Cyprien, sa ville natale.

Elle, c’est Marion, la plus spontanée et bordélique des étudiantes en communication d’entreprise. Passionnée par le graphisme, l’audiovisuel, le multimédia mais aussi par l’écriture et la nature, elle vit avec son père dans l’Hérault, dans un Mas isolé depuis que sa mère est subitement décédée, trois ans plus tôt. Simple et pétillante, c’est une fille très affective qui a un grand sens de l’amitié et de belles valeurs humaines. Ainsi, à l’aube de cet été 2022, elle n’hésite pas à bousculer ses projets pour soutenir son amie Laura, plongée dans la détresse d’avoir, elle aussi, à son tour, perdu subitement sa mère, Béatrice.

Sur la route, Marion se remémore ces innombrables après-midi, journées, week-ends à jouer chez Laura. Elle repense à tous ces jours, à la météo maussade, enfermées dans sa chambre à confectionner des habits pour leurs poupées avec du papier toilette, des feutres et des élastiques ; à jouer à être des sœurs-princesses séquestrées dans une tour, car enlevées par le méchant gangster, qui n’est autre que l’assassin de leur père, le roi… Elle revit ces jours ensoleillés à patiner ou à trottiner autour de la place d’en face, à faire des figures improbables en sautant sur le trampoline ou dans la piscine. Au fur et à mesure des kilomètres parcourus sur l’autoroute A9, elle sourit, le cœur gros et les yeux pleins de nostalgie. Elle sent encore l’odeur des pâtes à la carbonara que Béa leur faisait le midi. Été comme hiver, elle ne savait faire que ce plat-là, du moins c’est ce que Marion pensait étant petite et cela lui convenait parfaitement car elle les dévorait. Béa leur faisait aussi des crêpes et les garnissait avec du chocolat noir qu’elle faisait fondre avec trois tonnes de beurre directement au micro-ondes. Elle l’a si souvent gardée qu’en plaisantant, elle disait souvent de Marion qu’elle était sa « fille adoptive ». En dépassant le panneau indiquant l’entrée dans le département des Pyrénées-Orientales, Marion réalise que dans une trentaine de minutes elle sera face à son amie et à sa douleur d’avoir perdu sa maman. Mais elle sera surtout face à la sienne : face à la souffrance d’avoir, elle aussi, perdu Béa, cette « maman adoptive » si drôle, si pleine de vie, ne sachant cuisiner qu’un seul plat et qu’un seul goûter. Elle se conditionne pour être assez forte et assez calme lorsqu’elle devra être un pilier pour Laura. Les mains agrippées en position 10 h 10 sur son volant, elle pratique la respiration lente et consciente apprise sur la dernière application de cohérence cardiaque téléchargée sur son smartphone en rallongeant ses expirations, mais les larmes coulent à torrent. Perdre sa maman si tôt et si brutalement, Marion l’a aussi malheureusement vécu à la suite d’un accident de ski, il y a peu. Un stupide accident à n’y rien comprendre. La vie est là et la seconde d’après, plus rien, le néant, l’absence totale et définitive. Cette dure épreuve refait surface dans sa tête, dans son corps et dans sa chair. Elle ne le souhaite pas, mais elle redoute terriblement de devoir revivre la douleur de la mort de sa mère à travers celle de Béa. Proche de l’arrivée, il est temps de se reprendre. Elle zappe sur les différentes stations de radio et tombe sur Don’t stop me now deQueen.Comme pour se rebooster, comme pour se recharger d’énergies positives, elle augmente le volume du poste radio et chante à tue-tête ce morceau si entraînant, chassant ainsi la tristesse cumulée jusqu’alors.

En se garant devant le portail, Marion voit Laura à la fenêtre de sa chambre. Elle l’a vue. Le temps d’une seconde, le temps d’un sourire, le temps d’une larme incontrôlée qui coule sur sa joue, elles se retrouvent dans l’allée du jardin et se serrent dans les bras avec beaucoup d’émotions. Sans aucune salutation de prédiscussion, Laura, le cœur gros et la gorge nouée, s’effondre. Elle associe sa dure réalité à la dernière phrase de fiction qu’elle a entendue juste avant de souhaiter bonne nuit à sa mère, la veille au soir :

— Hier, en allant se coucher, je l’ai à peine calculée car j’étais devant un vieil épisode de Grey’s Anatomyet, pile quand elle est venue m’embrasser, Meredith Greydisait : « Tu ne sais jamais quand le dernier baiser sera le dernier, tu penses qu’il y en aura plein d’autres, tu crois que tu as la vie, mais c’est faux. ». Et ce matin… plus rien. Fini.

Face au malheur qui frappe Laura, le mental de Marion n’a plus de contrôle et cède de nouveau la place aux tourments. Toutefois, comme pour guérir ses maux, comme pour atténuer ce bouillon d’émotions amères, elle l’enlace de tout son amour.

— Je sais ma toute belle… je sais !

— Merci d’être venue si vite ma copine.

Elle, c’est Laura, la meilleure amie de Marion. Neuf mois plus jeune qu’elle, Laura l’a rencontrée à la crèche et l’a suivie à la maternelle. Puis, une fois en élémentaire, elle a même sauté un niveau et l’a rejointe dans la même classe. Sa mère et son père se sont rencontrés grâce au père de Marion. Ils étaient bons amis. Et même si leurs parents ont cessé de se voir à la suite de la séparation des parents de Marion, les deux jeunes filles ont continué d’agir comme des sœurs, peu importe la centaine de kilomètres qui les séparaient.

Face au cercueil posé sur le parvis de l’église, Laura et son père, dignes et forts, reçoivent, tour à tour, les condoléances de l’assistance. Entourée de tous ses amis d’enfance, Marion, attristée par la douleur de Laura, subit cette scène accablante. Un spectacle qui la renvoie trois ans auparavant, entourée des quatre mêmes copains, du même curé, des mêmes serments et des mêmes attitudes. Ce que Laura vit, Marion l’a vécu en 2016. Si Nietzsche écrivait en 1888 dans Crépuscule des idoles« ce qui ne tue pas nous rend plus fort», elle se demande aujourd’hui en 2022, si ce qui tue notre maman nous rend aussi plus forts. Cela a, en tout cas, renforcé les liens de complicité qu’elle a avec son père, depuis qu’elle l’a rejoint. À présent, avec Béatrice qui disparaît, une seconde icône maternelle est effacée du tableau. Une mort de plus qui impacte la vie de Marion. Chaque mort apporterait-elle un élément nouveau à sa vie ?

Du haut de la petite place de l’église où sont juchés tous les proches de la famille de la défunte, Marion attend son tour pour embrasser son amie. En dépit de toute la compassion ressentie à cet instant, elle se sent dérangée, elle perçoit la sensation lourde d’être observée. Elle se retourne et voit au loin, dans la rue principale traversant le village, un jeune homme qui fume une cigarette au volant d’un vieux break noir. L’échange de regards est très intense, mais Roxane la ramène à l’instant présent, face à ce cercueil.

— Marion ? Meuf, c’est à nous.

— Ouais pardon.

Le petit groupe de copains solidaire apporte à Laura toute la sollicitude et l’amitié nécessaires à travers de chaleureuses étreintes. Mais, Marion, comme déconnectée, sent son regard repartir vers le jeune homme. Son visage lui dit quelque chose. Elle semble le connaître. Pourtant, elle ne l’a jamais vu. Dans son champ de vision apparaît une quinquagénaire, visiblement très peinée. Sa fine silhouette, vêtue d’une longue veste assortie à la couleur bordeaux de ses Docs Martens, rejoint précipitamment le break noir et monte côté passager. Elle essuie une larme, le jeune homme ténébreux l’embrasse sur le front et met sa ceinture. Son regard noir se plonge une dernière fois dans celui de Marion avant de démarrer et de s’éloigner doucement. Le parvis de l’église se vide peu à peu, laissant la famille proche de la défunte partir pour la crémation, pour le dernier au revoir. Le groupe d’amis étreint une dernière fois Laura avant de la quitter et de se réunir autour d’un déjeuner.

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Mis à jour : Chapitre 42 No.42   12-01 11:23
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