Le coup de grâce est venu de mon fils de cinq ans, qui s'est blotti contre elle en criant :
« Je veux que Tata Élia soit ma nouvelle maman ! Toi, tu es toujours malade ! »
Le cœur en miettes, j'ai signé.
J'ai tout cédé. L'entreprise, la maison, ma place.
Quelques heures plus tard, alors que je rendais mon dernier souffle seule dans une chambre d'hôpital glaciale, Élia m'a envoyé un ultime message :
« Tu crèves enfin. J'ai gagné. J'ai tout pris et tu n'es plus rien. »
Mais ils ignoraient tous une chose capitale.
Dans ce contrat qu'ils m'ont pressée de signer, j'avais inclus une clause invisible pour leurs yeux avides.
J'ai légué la coquille vide de l'entreprise à Élia, mais les formules secrètes, l'âme même de nos milliards, je les ai offertes à une fondation caritative.
Quand ils ouvriront mon testament demain matin, ils comprendront que leur cruauté vient de signer leur ruine totale.
Chapitre 1
Ambre Hamelin POV:
Chaque matin, la même routine. Je prenais la pilule amère, un petit comprimé blanc qui ralentissait l'inévitable, mais ne l'arrêtait pas. Son goût métallique se mêlait à l'odeur de mon propre corps, une odeur subtile de défaillance que personne d'autre ne semblait percevoir.
Le docteur Dubois avait des yeux fatigués, mais brillants d'une pitié que je ne voulais pas. Une pitié silencieuse, chargée du poids d'une vérité qu'il ne pouvait que murmurer.
« Trois mois, Ambre. Peut-être quatre avec le traitement le plus agressif. »
Ces mots résonnaient en moi, un compte à rebours macabre, froid et implacable. Pas de surprise, pas de choc. Juste la confirmation. Mon horloge interne battait déjà ce rythme funèbre depuis des semaines.
Je me suis levée du lit, les jambes lourdes, et j'ai enfilé une robe simple. La pièce adjacente résonnait déjà des rires et des éclats de voix. La famille. Toujours bruyante, toujours vivante.
J'ai ouvert la porte. Le silence est tombé comme un couperet.
Lionel, mon mari, a laissé tomber sa fourchette sur la nappe immaculée. Mon fils, Owen, a figé son sourire. Mes parents, Edmond et Christiane, se sont raidis sur leurs chaises, leurs visages se fermant. Élia, ma sœur adoptive, a cessé de rire, mais un éclair de triomphe a traversé ses yeux avant qu'elle n'affiche une façade de fausse préoccupation.
« Eh bien, te voilà enfin, Ambre, » a lancé Maman, la voix aussi tranchante que le cristal sur la table. « Tu n'as pas oublié ton rendez-vous avec le médecin, n'est-ce pas ? »
« Non, Maman, » ai-je répondu, ma voix étrangement calme.
« Et qu'est-ce qu'il a dit cette fois-ci ? » a demandé Lionel, les bras croisés. Son ton n'était pas celui d'un mari inquiet, mais d'un juge impatient. « Toujours cette 'maladie mystérieuse' qui n'apparaît sur aucune IRM ? »
« C'est ça, la maladie qui nous harcèle tous, » a gloussé Élia, masquant sa bouche d'une main fine.
Maman s'est levée. « Ambre, ne t'approche pas d'Élia. Elle est très fragile en ce moment. Nous ne voulons pas de tes crises habituelles. »
« Les Hamelin sont une famille respectée, Ambre, » a ajouté Papa, sa voix grave. « Nous ne pouvons pas nous permettre ce genre de... drame. Tu as toujours été une enfant difficile, trop dramatique. »
« Parfois, je me demande si tu n'étais pas une erreur de la nature, » a craché Papa, son regard se posant sur Élia, qui s'était blottie contre Lionel, jouant la victime effrayée.
Élia m'a regardée avec un sourire narquois, un sourire de victoire à peine dissimulé derrière sa main.
J'ai juste souri, un sourire amer qui n'atteignait pas mes yeux. J'étais fatiguée de me battre. Les arguments, les supplications, les tentatives désespérées de faire comprendre ma douleur. Tout avait été vain.
Je me souvenais des innombrables fois où j'avais tenté de leur expliquer, de me justifier. Chaque fois, ils avaient brandi Élia comme un bouclier, une preuve que j'étais la mauvaise, la jalouse, la malade imaginaire.
« Tu manipules, Ambre. »
« Tu es jalouse de l'attention qu'Élia reçoit. »
« Tu as besoin d'aide psychologique. »
Ces mots résonnaient encore, les mêmes rengaines, les mêmes accusations. J'avais imploré, argumenté, montré mes rapports médicaux, mais ils avaient tous été rejetés comme des falsifications, des tentatives de voler la vedette à "pauvre Élia".
Maintenant, je ne ressentais plus rien, sinon une lassitude profonde. La vérité n'avait plus d'importance. Ma vie touchait à sa fin, pourquoi gaspiller ma précieuse énergie à les convaincre ?
« Ambre, » a dit Papa, sa voix plus douce, mais empreinte d'une autorité glaciale. « Nous devons parler. »
Il m'a regardée comme s'il s'adressait à un objet encombrant qu'il devait déplacer.
« La Banque Hamelin a tenté de te joindre toute la matinée. »