Son regard, perçant et calculateur, balayait les informations sur l'écran de son ordinateur. Un dossier s'affichait, détaillant les récentes acquisitions de Lorenzo Caruso, un rival qu'il pensait avoir écrasé il y a des années. Mais Caruso était plus résilient qu'il ne l'avait imaginé. En silence, Leonardo serra la mâchoire. Ce salaud tentait de racheter des parts stratégiques de ses entreprises, infiltrant lentement mais sûrement son empire, comme un poison insidieux.
Un léger bruit de pas derrière lui interrompit ses pensées.
- Tout va bien, Leonardo ? demanda Matteo, son bras droit, déposant un verre de whisky sur le bureau en acajou.
Leonardo détourna enfin son regard de l'écran pour fixer Matteo, un homme en qui il avait une confiance absolue.
- Caruso bouge, murmura-t-il en attrapant le verre.
Matteo haussa un sourcil avant de s'approcher, scrutant les documents.
- Il veut t'affaiblir de l'intérieur. S'il met la main sur ces parts, il aura un levier pour influencer tes décisions.
- Je sais, répliqua Leonardo d'un ton tranchant. Et je ne compte pas le laisser faire.
Il porta le verre à ses lèvres, savourant la brûlure du whisky avant de poser son regard sur la ville. Il avait toujours su que le monde des affaires n'était qu'un champ de bataille déguisé en dîners mondains et contrats raffinés. Il avait survécu en étant plus rusé, plus impitoyable que les autres. Mais cette fois, il devait frapper différemment.
Son esprit se mit à tourner à toute vitesse. Une solution. Un coup d'avance. Quelque chose qui ne laisserait aucune chance à Caruso.
Puis, une idée germa dans son esprit.
- Valentina De Luca, murmura-t-il, presque pour lui-même.
Matteo fronça les sourcils.
- L'héritière ?
- Son empire familial est un pilier du secteur de la mode, un domaine que Caruso convoite. S'il tente d'investir, il lui faudra son approbation.
Matteo comprit aussitôt.
- Si tu l'épouses, son empire devient une extension du tien.
Leonardo esquissa un sourire froid.
- Exactement.
Mais ce n'était pas si simple. Valentina De Luca n'était pas le genre de femme à être achetée comme un actif. Il l'avait croisée quelques fois, lors de galas et d'événements mondains. Brillante, charismatique, avec une beauté qui ne laissait personne indifférent. Mais ce n'était pas ce qui l'intéressait. Ce qui comptait, c'était son influence.
Matteo hésita.
- Tu penses qu'elle acceptera ?
Leonardo posa son verre et s'appuya contre son bureau.
- Tout le monde a un prix, Matteo. Il suffit de trouver ce qu'elle désire.
Un sourire en coin, il attrapa son téléphone et composa un numéro. Il n'avait jamais eu à supplier qui que ce soit, et il ne comptait pas commencer maintenant. Mais il savait comment obtenir ce qu'il voulait.
La sonnerie retentit une fois, puis une seconde, avant qu'une voix féminine, suave et teintée d'amusement, ne réponde.
- Leonardo Bianchi. Voilà une surprise.
Il ferma brièvement les yeux, savourant la sonorité de son nom dans sa bouche. Valentina De Luca n'avait pas besoin de faire des efforts pour être séduisante, elle l'était naturellement, jusque dans sa manière de parler.
- Valentina, répondit-il d'une voix égale. J'aimerais te voir. Ce soir.
Un léger rire lui parvint.
- Depuis quand donnes-tu des ordres à des femmes qui ne travaillent pas pour toi ?
Il sourit, appréciant son audace.
- Je ne donne pas d'ordres. Je propose une opportunité.
Un silence s'installa de l'autre côté. Puis elle reprit.
- J'ai un dîner à La Scala. Si tu veux me voir, rejoins-moi.
Elle venait de renverser la dynamique. C'était elle qui imposait les conditions. Intéressant.
- Très bien, concéda-t-il. À tout à l'heure.
Il raccrocha et se tourna vers Matteo.
- Prépare la voiture.
***
Le restaurant La Scala était un lieu prisé de l'élite milanaise, et ce soir, il regorgeait de figures influentes. Lorsque Leonardo entra, vêtu d'un costume sur mesure, toutes les têtes se tournèrent vers lui. Il n'y prêta aucune attention. Son regard ne cherchait qu'une seule personne.
Et il la trouva.
Valentina était assise à une table privée, vêtue d'une robe noire élégante qui contrastait magnifiquement avec sa peau dorée. Ses cheveux tombaient en vagues parfaites, et elle tenait une coupe de champagne entre ses doigts fins. Lorsqu'elle le vit, elle sourit légèrement, comme si elle s'attendait à ce qu'il vienne à elle.
Il s'approcha avec assurance, s'installant face à elle sans attendre d'invitation.
- Tu es ponctuel, fit-elle remarquer en portant son verre à ses lèvres.
- Et toi, provocante, répondit-il en la détaillant du regard.
Elle haussa un sourcil amusé.
- Alors ? Quelle est cette « opportunité » que tu voulais me proposer ?
Leonardo croisa les doigts sous son menton.
- Un mariage.
La coupe de champagne s'arrêta à mi-chemin de ses lèvres. Ses yeux, d'un brun profond, s'écarquillèrent brièvement avant qu'un rire franc ne lui échappe.
- Excuse-moi ?
- Tu as très bien entendu. Un mariage entre toi et moi.
Elle posa lentement son verre et le fixa, son amusement remplacé par une curiosité méfiante.
- Pourquoi moi ?
- Parce que nos intérêts convergent, répondit-il calmement. Caruso essaie d'acheter des parts de mon empire. Si nous nous unissons, nous serons intouchables.
Elle l'observa un instant, songeuse.
- Et moi ? Qu'est-ce que j'y gagne ?
Leonardo s'y attendait. Elle ne se jetterait pas dans ses bras juste pour la beauté du geste. Il posa un coude sur la table et la regarda droit dans les yeux.
- De l'indépendance.
Elle plissa légèrement les yeux.
- Explique-toi.
- Ton père a toujours dirigé ton empire dans l'ombre, malgré ton talent. Un mariage avec moi te donnerait un pouvoir absolu. Personne ne pourrait plus jamais remettre en doute ta position.
Il vit son regard vaciller un instant. Il avait touché juste.
- Tu veux dire que j'aurais enfin la liberté de prendre mes propres décisions ?
- Exactement.
Elle s'adossa à sa chaise, le jaugeant avec intensité.
- Et toi, Leonardo ? Qu'est-ce que tu veux vraiment ?
Il ne répondit pas immédiatement. Il aurait pu lui dire que tout cela était purement stratégique. Mais au fond de lui, une part de lui savait que ce n'était pas seulement ça.
- Le pouvoir, murmura-t-il finalement. Et peut-être... quelque chose de plus.
Valentina le fixa un long moment avant de sourire doucement.
- Tu es dangereux, Leonardo Bianchi.
Il sourit à son tour.
- Et toi, Valentina De Luca, es-tu prête à jouer à ce jeu ?
Elle attrapa son verre, l'éleva légèrement et le porta à ses lèvres.
- Je vais y réfléchir.
Leonardo se redressa, satisfait. Il savait qu'il avait déjà semé le doute en elle. Ce n'était plus qu'une question de temps.
Et dans le monde de Leonardo Bianchi, le temps jouait toujours en sa faveur.